La vie après UniNE

« Une vie professionnelle en forme de mosaïque »

Pauline de Montmollin, gestionnaire culturelle à Neuchâtel

Pauline de Montmollin a obtenu un Master en lettres et sciences humaines - archéologie, ethnologie, histoire et esthétique du cinéma, muséologie - en 2007. Avec dans les mains plusieurs formations complémentaires dans les secteurs de la communication et de la gestion culturelle, elle travaille pour trois musées neuchâtelois et a créé l’agence « Cultissime ».

Vous collaborez non pas avec un, mais avec trois musées neuchâtelois !

Pour le Muséum d’histoire naturelle, je travaille comme chargée de communication et bibliothécaire scientifique, donc tout ce qui concerne la gestion des savoirs – livres, archives, numérique. J’ai un 30% de bibliothécaire, 30% de communication et 20% de conservatrice pour le développement d’expositions. Je fais également de la médiation culturelle au Laténium et au Musée d’art et d’histoire : ateliers, visites guidées, organisation d’événements, la Nuit des musées pour le Laténium, par exemple.

Vous êtes aussi la co-fondatrice d’une agence, « Cultissime », où vous travaillez notamment à la valorisation du patrimoine de certaines marques.

Avec ma formation d’archéologue, je n’avais jamais envisagé l’indépendance. Elle s’est imposée à moi lors des différentes formations dans le domaine de la communication que j’ai suivies : on m’a approchée pour me proposer des mandats. Avec une amie qui a fait des études assez proches des miennes, on a décidé de se lancer. On a monté une petite société, en ne risquant pas grand-chose puisque nous avions toutes deux un travail fixe à côté. Je n’ai pas envisagé que « Cultissime » me fournisse mon salaire principal, je n’y consacre pas toutes mes forces, c’est un « extra » dans ma vie, la partie un peu plus imprévue, trépidante, qui me permet aussi de faire des choses – s’occuper du patrimoine d’une marque - que je ne me verrai pas nécessairement faire à longueur d’année.

Quand je vois ma vie professionnelle, qui est vraiment en forme de mosaïque, je trouve que cela représente assez bien les études en lettres qui, selon la formule habituelle, ne préparent à rien, mais préparent à tout !

Il y a en effet une grande diversité dans vos occupations mais pas mal de cohérence aussi. Comment les choses se sont-elles définies dans la foulée de vos études ?

Elles se sont précisées au fil du temps. Cela a toujours correspondu à des intérêts personnels. Par exemple, j’ai toujours adoré le patrimoine industriel, au titre de loisir. Au départ, je n’aurais pas pensé que tout cela puisse converger, ce n’était pas prévu. D’ailleurs j’avais même commencé une thèse après mon master, preuve que je me destinais plutôt à la recherche.

Vous avez fait votre mémoire de master en archéologie préhistorique mais vous êtes aujourd’hui dans la « com », un secteur ancré dans le présent…

Lors de mes études, j’ai eu la chance d’être fortement encouragéeà faire des stages.C’est comme ça que j’ai commencé à travailler assez rapidement dans le monde des musées. J’ai donc toujours eu un pied à l’université et un pied dans les musées. Dans le milieu de la recherche, certains me l’ont d’ailleurs reproché, car c’est un milieu où l’on aimerait souvent que chacun sacrifie tout à ses recherches. « Tu es doctorante et tu interromps tes recherches pour faire le guide avec des enfants de 3ème primaire ? »

Pour moi, si on fait de la recherche, c’est justement pour redonner ensuite, et pas seulement sous forme d’articles. Je trouvais important que ces enfants aient droit – sans mettre les scientifiques sur un piédestal – à quelqu’un qui était au cœur de la recherche, qui pouvait vraiment répondre à leurs questions.

La multiplicité de vos occupations rejoint la multiplicité de vos formations. Vous êtes manifestement une boulimique de formation continue !

L’année prochaine, je n’ai rien prévu et c’est très dur (rires) ! C’est vrai que j’ai une grande curiosité. Ma pratique professionnelle s’enrichit incroyablement du fait de toucher à d’autres domaines, de rencontrer d’autres spécialistes. Lors de ma formation en communication, j’ai fait par exemple de la communication financière, ce qui à priori ne m’intéresse pas du tout. Mais j’ai trouvé très enrichissant de rencontrer des personnes d’autres horizons, cela nourrit beaucoup ma pratique professionnelle.

Quels ont été les points forts de votre formation à l’UniNE ?

Tout le monde le dit, mais c’est vrai : la proximité avec le corps professoral, les assistants, les chargés de cours. J’ai suivi une partie de mon cursus à Lausanne, ce qui m’a permis de vraiment comparer. Sur les deux ans que j’y ai passés, dans de grands amphithéâtres, personne n’a jamais su mon nom ! On s’en fichait que je sois là ou non, alors qu’à Neuchâtel, on cherche à faire ressentir à l’étudiant, non pas que la science a besoin de lui, mais qu’il a sa contribution à lui apporter !

On nous a également fait sentir assez vite qu’il faut s’impliquer dans ce qu’on fait pour pouvoir trouver une application à nos études. Et que les profs ne sont pas là juste pour donner une formation mais pour nous aider à devenir de vrais professionnels.

Aujourd’hui, dans votre quotidien professionnel, que retenez-vous concrètement de vos études universitaires ?

Au fil du temps, j’ai fait le « tri sélectif » ! En sortant de l’uni, j’avais une vingtaine de classeurs plus ma thèse en cours. Au fil des années, je vais repêcher des choses, qui aboutissent dans des classeurs plus restreints, mais qui se trouvent dans mon bureau, pas au grenier ! Il y a donc des cours, des articles, des bibliographies auxquels je fais encore appel. Et certains professeurs m’ont vraiment marquée, que ce soit pour des questions de comportement ou sur un plan intellectuel. Certains ont été des modèles pour moi.

Quel conseil donneriez-vous à un futur étudiant ?

Pour moi, cette question s’est posée avec mon frère, qui hésitait beaucoup. Il est vrai qu’on est tiraillé entre l’idée de faire quelque chose qui nous plaît, sans penser en termes de métier, et le constat qu’on sort de l’uni en même temps que d’autres gens qui ont exactement la même formation que nous, avec ce que cela implique en matière d’embauche. Personnellement, je me suis donc dit qu’il fallait que je fasse ensuite une autre formation pour me permettre de me distinguer – et je crois que c’est tout de même un peu la clé !

J’en suis donc arrivé à la conclusion que peu importe ce qu’on choisit pour un bachelor. Il faut opter pour une matière avec laquelle on pense avoir des affinités, même si bien sûr on ne la connaît pas encore vraiment, en gardant à l’esprit qu’on pourra cibler davantage lors du master. C’est d’ailleurs ce qui est bien avec le système de Bologne, cette façon de ne pas devoir tout choisir dès le début.

Sinon, pour découvrir ce qu’on aime faire, les stages sont vraiment utiles. Savoir si l’on préfère travailler seul ou en équipe, dans un bureau ou sur le terrain. Et il est important de partir pour apprendre à parler couramment une autre langue : je ne l’ai pas fait et c’est mon seul regret par rapport à mes études.

Interview UniNE 2013