Communiqué

Moustique tigre sous haute surveillance

20 avril 2016

Vecteur de plusieurs maladies graves, dont le récent virus Zika, le moustique tigre utilise des moyens de transport aussi étonnants que des pneus usagés pour se propager. C’est ce que rappelle la biologiste Eleonora Flacio dans une thèse de doctorat qu’elle soutient aujourd’hui à l’Université de Neuchâtel. Son travail rassemble des données sur la propagation et le contrôle d’Aedes albopictus entre 2003 et 2014 au Tessin, point de départ de sa présence en Suisse. La chercheuse en conclut que même si aucune contamination virale locale de la population suisse due à cet insecte n’a encore été détectée, la vigilance reste de mise.

Au Tessin, le moustique tigre est une des quatre espèces exotiques qui vivent aux côtés de 21 espèces indigènes actuellement répertoriées. Originaire des forêts du sud-est asiatique, il pique de jour et peut transmettre différents virus tels le Chikungunya, la dengue ou encore le Zika. Depuis quelques décennies, il se répand à travers le monde. En 1979, il avait atteint l’Europe où il est décrit la première fois en Albanie, probablement en provenance de Chine. Mais c’est en Italie où il est introduit en 1990 qu’il montre la plus forte progression. En 2000, alerté par cette situation, le groupe de travail chargé du contrôle des moustiques au Tessin, dont fait partie Eleonora Flacio, entreprend une surveillance aux frontières.

Sa distance de vol dépassant à peine une centaine de mètres, le moustique tigre emprunte des moyens de transports originaux, comme les pneus usagés. « Souvent entreposés à l’air libre, les pneus accumulent l’eau de pluie qui finit par y stagner, constituant un abri idéal pour les œufs du moustique», explique Eleonora Flacio, coresponsable du programme suisse de surveillance du moustique tigre pour la Suisse auprès de la SUPSI (Haute école spécialisée de la Suisse italienne). L’insecte est ainsi arrivé dans la péninsule italienne via un commerce de pneus avec les Etats-Unis où sa présence était attestée depuis le milieu des années 1980.

«La Suisse est toutefois protégée de ce mode de propagation, puisqu’à notre connaissance, il n’y a pas de commerce de pneus usagés venant de l’étranger», indique Eleonora Flacio. Mais le moustique n’en reste pas immobile pour autant : silencieux, il talonne ses hôtes potentiels pour s’enfiler discrètement dans les habitacles des voitures privées ou des camions. Résultat ? On le suit à la trace sur les autoroutes du pays, détectant ainsi sa présence au nord des Alpes dès 2013. Son expansion vers le nord semble d’ailleurs inéluctable : des colonies sont désormais établies à Freiburg-en-Brisgau (Allemagne), à 70 km à peine de Bâle où sa présence n’est encore que ponctuelle.

«Les données collectées au Tessin sur Aedes albopictus ont été utilisées pour modéliser les autres lieux potentiels de Suisse où le moustique pourrait s’établir dans un contexte du réchauffement climatique qui lui est clairement favorable, ajoute la biologiste. Le lac Léman et, dans une certaine mesure, le plateau Suisse sont les régions menacées par le moustique tigre.»

Mais comment empêcher la prolifération de cet insecte indésirable ? «En le privant d’eau dans les milieux urbains, répond la spécialiste. Cela consiste à éliminer tout récipient qui puisse se remplir d’eau et traiter les endroits contenant de l’eau stagnante que l’on ne peut vider, comme les égouts, avec des produits spécifiques.»

Le communiqué au format pdf

Contact :

Eleonora Flacio
Gruppo di Lavoro Zanzare
Laboratorio Microbiologia Applicata (DACD)
Scuola universitaria professionale della Svizzera italiana
Via al Castello, CH-6952 Canobbio

Tél. +41 91 935 00 47
eleonora.flacio@supsi.ch

En savoir plus :

Mise au point, RTS Un, 7 février 2016 :
Le moustique tigre, porteur potentiel de Zika, repéré au nord de la Suisse

Groupe de travail du Tessin sur les moustiques (en italien) :
www.ti.ch/zanzare